04 Oct Les jardins secrets de l’Institut Audiovisuel de Monaco
19e saison cinématographique pour l’Institut audiovisuel de Monaco. De septembre 2022 à juin 2023, 33 films seront projetés, avec un fil rouge reliant toutes ces œuvres : Les jardins secrets. Mais ce n’est pas tout, puisque l’établissement monégasque a récemment ouvert de nouveaux locaux, qui proposent une programmation parallèle de projections, expositions et ateliers…
L’Institut Audiovisuel de Monaco lance sa saisonnees que Jacques Kermabon et Vincent Vatrican présentent ainsi : « Des mots, des obsessions, des blessures, mais derrière l’éclat de leur mise en scè ou la portée de leur histoire, quel autre fil d’Ariane relie entre eux les personnages et les films de cette saison ? Ce qui fait que nous les aimons tous, aussi différentes que soient leurs origines et leurs formes : une noblesse de caractère, une louable générosité, préférant la voie feutrée de la confidence à la seule efficacité d’un scénario. Et plus que tout, peut-être, une faculté à créer dans le récit un espace que le spectateur investit pour observer ce qui se murmure parfois dans les jardins secrets du cinéma« . Voilà comment Jacques Kermabon et Vincent Vatrican expliquent la façon dont ils ont conçu cette nouvelle saison. Leurs choix vous permettront de redécouvrir des chefs d’œuvres aussi bien récents que les « classiques ». Une programmation à découvrir en détail sur toutlartducinema.mc !
Préserver le patrimoine de l’image
Nous avons rencontré Vincent Vatrican, qui dirige et développe l’Institut Audiovisuel de Monaco, fleuron de la conservation de films « domestiques » et bien plus encore. On y digitalise et on y classe de nombreuses photos, films et documents sonores qui remontent à l’invention du cinéma, de la photo et du phonogramme – la France serait bien inspirée d’en faire autant… D’ailleurs, chaque film programmé est précédé d’une à deux minutes de projection de ces archives, permettant ainsi de faire un bond dans le temps et dans l’histoire du quotidien dans notre région, comme une préparation pour découvrir un chef d’œuvre du passé.
Nouveautés
Vincent Vatrican nous a annoncé quelques nouveautés pour cette saison. Il développe une transversalité avec d’autres acteurs et d’autres lieux de la Principauté, comme le label Jazz. Il permettra chaque année, à l’occasion du Monte-Carlo Jazz Festival, de voir un film sur cette musique soit un biopic d’un grand du jazz, soit un film dont la BO a été composée par un jazzman. Le 1er décembre 2022, nous pourrons ainsi visionner un documentaire rare du grand photographe Bruce Weber, sur Chet Baker : Lets’ get lost (1988). La deuxième nouveauté est le développement d’un lien avec l’association Dante Aleghieri qui œuvre à la diffusion de la Culture italienne. Un de ses membres a travaillé longtemps à la RAI et connaît nombre de cinéastes italiens qui viendront présenter un de leurs films.
Diversité des lieux
Les lieux aussi se diversifient. Le ciné-concert avec l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo, sur Le Cabinet du Docteur Caligari de Robert Wiene (1920), se tiendra logiquement dans le somptueux Opéra Garnier. Quant au mythe du cinéma, West Side Story (1962), comédie musicale de Robert Wise et Jerome Robbins, présenté en partenariat avec les Ballets de Monte-Carlo en décembre, sera projeté au Grimaldi Forum, tandis qu’Orson Welles et son Falstaff (1966) trouveront parfaitement leur place au Théâtre Princesse Grace. L’Institut a par ailleurs récemment ouvert au public de nouveaux locaux : Le Cabinet de curiosité et La Petite Salle. Responsable de l’action culturelle, Estelle Macé nous a entretenu des nouveautés qui permettront au public de bénéficier des services de ce lieu exceptionnel qu’est l’Institut Audiovisuel de Monaco.
Le Cabinet de curiosité
Le Cabinet de curiosité permet d’accueillir régulièrement des expositions thématiques et de montrer sur le long terme les archives de l’Institut – tant photographiques, sonores, que cinématographiques – ou encore du matériel technique, avec lequel nous constituons les archives de décennie en décennie. En ce moment, Cinémato!, qui se terminera le 30 décembre 2022, retrace la démarche pionnière du Prince Albert 1er qui dès les débuts de l’invention de la photographie, de la capacité à enregistrer le son grâce au phonographe inventé par Thomas Edison, dès les débuts du Cinéma, s’est enquis des technologies de l’époque, dans un souci de captation esthétique du monde, mais surtout afin de témoigner de ses voyages et campagnes océanographiques, de ses rencontres. Des photographies et films qu’il appelait des « cinématos« , et qu’il montrait par la suite lors de conférences aux quatre coins du monde – Washington, Munich, Berlin… – pour convaincre scientifiques et mécènes du besoin de mener des recherches océanographiques. On doit à Louis et Auguste Lumière l’invention du cinéma en 1895. Eh bien, à peine deux ans plus tard, Albert 1er achètera une caméra chronophotographique Demeny auprès de Léon Gaumont, et tournera son premier film à Safi au Maroc, en juin de la même année. Conservé à l’Institut, ce document est encore accessible aujourd’hui grâce à sa restauration par l’Institut. C’est assez impressionnant, ça ressemble à une « vue Lumière » sauf que ça a été réalisé avec un autre appareil et par le Prince Albert 1er !
En janvier 2023, s’ouvrira dans le même espace une exposition totalement dédiée à l’invention en 1923 du Pathé Baby, un projecteur pour visionner des films dans son salon particulier, et de la Caméra Pathé Baby, qui permet à M. Toutlemonde (évidemment un peu argenté) de filmer lui-même son environnement, sa famille, ses loisirs… Un outil qui nécessitait une pellicule 9x5mm, le tout premier format pour les cinéastes amateurs !
La Petite Salle
Dans la Petite Salle, plusieurs ateliers accueilleront des jeunes pour les faire jouer avec les images et les films, les analyser, comprendre comment ils ont pu être réalisés… Mais aussi pour se rendre compte des changements par rapport à l’environnement d’aujourd’hui. Ce sont aussi des moments de création qui permettront de gratter, colorier, intervenir sur la pellicule d’un film existant, ou de filmer soi-même des petites scènes en y ajoutant des trucages. D’ailleurs, durant les vacances d’automne, deux après-midi seront réservées à l’expérimentation des trucages au Cinéma à la manière de Georges Méliès. En 2023, des ateliers pour tous les publics porteront sur le montage pour réaliser du found footage à partir des films amateurs tournés à Monaco.
Cette Petite salle accueillera aussi des séances de cinéma ouvertes à tous – et les mercredis après-midi, pour les jeunes. Le 25 novembre, par exemple, la cinéaste expérimentale Rose Lauder présentera Flowers and Bolex, travaux réalisés avec la mythique caméra Bolex, qu’elle utilise en image par image, non pas pour faire des films d’animation, mais pour créer des sortes de peinture faites par touches successives sur ses sujets favoris : la nature, les fleurs…
Rens : toutlartducinema.mc
photo : L’Inconnu de Shandigor de Jean-Louis Roy (1968), projeté le 8 novembre 2022 au théâtre des Varités, à Monaco © Coll. Cinémathèque suisse