Regarde l’univers respirer

Regarde l’univers respirer

Selon les astrophysiciens, notre univers serait en perpétuelle expansion. En expansion, l’univers de l’artiste Régis Lesserteur, lui, l’est sans conditionnel.

Le fil rouge de son travail de sculpteur autour du bambou est bel et bien dans le mouvement comme s’il était en train de se produire. Une dynamique d’étirement dont la performance est de composer avec une dimension architecturale stabilisée.

Régis Lesserteur a conservé de sa vie antérieure de designer et de graphiste la passion des lignes dans leur épure. Et plus particulièrement du trait de fusain qui s’étire dans l’espace. Un geste spontané, irrépressible. Un crobard un jour sur un coin de table, l’envie soudaine de lui donner corps, d’envisager une troisième dimension. Et puis, ces bambous, là, au fond de son jardin. Sérendipité quand tu nous tiens… Mais oui, bien sûr ! Le bambou est le médium idéal ! Ses variations quasi infinies de diamètre autorisent tous les projets d’étirement. Au geste de l’artiste va dès lors s’adjoindre celui de l’artisan. Car le hasard qui semble présider à ces dynamiques de lignes… ne doit rien au hasard. Si tout démarre d’un croquis, élan instinctif de lignes, les brindilles sont ensuite assemblées une par une dans une logique de structure stable. Un hasard organisé. Des qualités mécaniques architecturales, une impression d’évanescence : telle est la magie du travail créatif de Régis Lesserteur.

Se reconnaissant volontiers dans le courant minimaliste, l’artiste travaille toujours autour d’un noyau qui semble s’étirer et comme disparaître, s’évanouir dans l’atmosphère. Univers d’échappées plutôt que de gravitation. Ses œuvres aériennes donnent à voir une respiration. Les lignes qui s’allongent à l’infini nous proposent en fait un enracinement dans l’univers. La grosseur des branches d’un arbre est dit-on à l’image de celle de ses racines. À l’instar de branches qui s’élancent en s’affinant vers le ciel, les lignes de bambou de Régis Lesserteur semblent disparaître dans l’éther pour mieux nous enraciner dans l’univers. Pour mieux en puiser l’énergie. Le plasticien vençois pourrait ainsi faire siens les mots de Rilke qui affirmait que « nous sommes les abeilles de l’univers ». Pour la simple raison que « nous butinons éperdument le miel du visible pour l’accumuler dans la grande ruche d’or de l’invisible. »

16 mai au 2 juin 2023 (vernissage 20 mai 12h), Chapelle des Pénitents Blancs, Vence. Rens: regislesserteur.com
photo: Sculpture 13 © Régis Lesserteur