Rouault au pays du père Ubu

Rouault au pays du père Ubu

Ce qui pourrait ressembler au titre d’une BD d’Hergé ou du duo Goscinny/Uderzo est en fait celui de l’exposition présentée par le Musée de l’Annonciade à Saint-Tropez, jusqu’au 25 juin prochain.

En 1896, Alfred Jarry crée Ubu, personnage central de son œuvre révolutionnaire qui inaugure le théâtre de l’absurde. Après la mort du dramaturge français, Ambroise Vollard, célèbre marchand d’Art rachète les droits d’exploiter la personne d’Ubu. Il rédige alors toute une série de suites à Ubu roi (Le père Ubu à l’Hôpital, Le père Ubu à la guerre, Le père Ubu au pays des Soviets…) regroupées en grande partie dans Les réincarnations du père Ubu.

Souhaitant illustrer son texte, il se tourne vers Georges Rouault, artiste à l’œuvre inclassable, au croisement de l’expressionnisme, du fauvisme et du cubisme. D’emblée, Rouault se passionne pour le personnage d’Ubu et le fait sien. Cette commande de grande ampleur qui occupe le peintre jusqu’en 1932, date de la publication des Réincarnations, lui offre une grande liberté stylistique et technique et lui permet de s’initier à l’eau-forte, d’expérimenter diverses techniques, de retravailler les gravures avec de la peinture à l’huile, du pastel ou encore de l’encre de Chine. Cette partie de l’œuvre de Rouault, déroulée sur 15 ans, demeure cependant peu connue et peu étudiée. Seule une exposition organisée au Japon en 2010 au Panasonic Shiodome Museum of Art de Tokyo s’est intéressée de façon détaillée à ces réalisations.

Pour la première fois en France, cette exposition met en exergue ce travail du peintre – par ailleurs exposé en ce moment à la Villa Théo au Lavandou, puis dès le 13 mai à l’Abbaye de la Celle – et retrace les grandes lignes de la genèse des Réincarnations du père Ubu, laquelle rassemble une quarantaine d’œuvres, pour la plupart issues de collections privées.

Jusqu‘au 25 juin, Musée de l’Annonciade, Saint-Tropez. Rens: saint-tropez.fr
photo: étude pour la page de titre, Georges Rouault, 1920-1929 ©JL Losi