30 Juin Au hasard des oiseaux
Emprunté à Jacques Prévert, Au hasard des oiseaux est le titre hautement poétique de la 3e biennale internationale de Saint-Paul de Vence. Les 20 œuvres des 12 artistes invités, aux renommées mondiales et de toutes générations, ont pour la plupart été produites pour l’exposition.
A l’invitation de l’association BIS, qui porte l’événement en collaboration avec la Municipalité de Saint-Paul-de-Vence, les commissaires de cette édition, Ludovic Delalande et Claire Staebler avaient pour idée, depuis environ 3 ans, de consacrer une grande exposition aux oiseaux. L’atterrissage à Saint-Paul de Vence est des plus pertinents : voilà un village perché qui accueille artistes et personnalités depuis 100 ans. À leur façon, ils viennent nicher, eux aussi, dans ce décor aux paysages époustouflants. C’est ce que représente le japonais Tadashi Kawamata par de gigantesques nids de bois perchés en quatre points cardinaux, symboliques, et visibles à des kilomètres, tels des appels accueillants.
A la fois sauvages, intouchables et incompris, les oiseaux sont pourtant nos objets, victimes des interventions humaines : de façon directe quand il s’agit de s’en nourrir et de manipuler le vivant – ce sur quoi insiste la sculptrice de béton, Anna Hulacova, indirectement quand il s’agit de les écarter de leurs territoires – comme l’évoque John Cornu par une installation aussi froide qu’un dispositif anti-pigeon. Ces œuvres résonnent amèrement avec la publication d’une étude récente dévoilant des chiffres édifiants : 25% des oiseaux d’Europe ont disparu, du fait quasi-exclusif de l’activité humaine.
Certains s’attachent à une espèce spécifique, pour ce qu’elle évoque : Petrit Halilaj intervient en trois points du village par l’apparition suggérée d’un coq en vadrouille. Les flamants roses de Jean-Marie Appriou nous renvoient au temps des dinosaures, par leur incarnation en bronze patiné de vert antique. Diana Thater fait parler des perroquets dans une installation vidéo, insistant sur leur intelligence et leur subjectivité. Nous pensons peut-être tout savoir mais nous comprenons mal les oiseaux, ce qu’évoque poétiquement James Webb par des installations inédites, enclines à troubler notre environnement sonore.
Bien sûr, l’oiseau est un symbole fort de liberté et de sagesse, ce que Giulia Andreani et Katia Kameli exploitent avec brio, par un audacieux travail de recherche historique et littéraire.
Et parfois l’approche semble plus anecdotique – comme le met en scène Caroline Mesquita avec ses oiseaux de métal, ou de l’ordre du quotidien et de l’habitude –fondement du travail de Xavier Veilhan.
Par leurs savoir-faire, leurs connaissances, leur technicité, ces artistes proposent des formes inédites qui bousculent nos perceptions et nous contraignent, toujours en douceur, à nous questionner sur la relation que nous entretenons avec le vivant (nous compris). La biennale propose d’en faire l’expérience en visite libre tous les jours, en visites accompagnées ou par le biais d’ateliers gratuits en famille.
Jusqu’au 1er oct, Saint-Paul de Vence. Rens: bis-art.com
Giulia Andreani, Tsvi-Tsvi 2023 Courtesy Galerie Max Hetzler Berlin Paris Londres ADAGP Paris 2023 © Frédéric Pasquini