Le vérisme d’Andrea Chénier

Le vérisme d’Andrea Chénier

Après Alcina de Haendel en janvier, la première saison de l’Opéra de Monte-Carlo signée Cecilia Bartoli se poursuit avec l’opéra vériste par excellence, Andrea Chénier, une œuvre peu montée et qui permettra d’entendre pour la première fois sur le Rocher l’un des grands ténors du moment, dans le rôle-titre, Jonas Kauffman.

Sur fond de révolution française, l’opéra d’Umberto Giordano mêle fiction et personnages réels autour de la personnalité romantique du poète Andrea Chénier, qui bien qu’ayant endossé les thèses révolutionnaires finira guillotiné par les Jacobins, accompagné dans la mort par la femme avec laquelle il partage une passion fusionnelle, Madeleine de Coligny. Tous les ingrédients sont réunis pour un livret comme on les aime à l’opéra, mêlant passion et tragédie. Le jeune compositeur, qui vient d’essuyer trois échecs cuisants, y joue là son va-tout et travaille avec l’énergie du désespoir dans sa petite mansarde de Milan. Son effort sera récompensé par un succès mondial, sauf en France, qui n’appréciera pas cette façon de s’emparer de son histoire ! Le savoir-faire de Giordano, qui nécessite de grandes voix pour rivaliser avec la puissance sonore de l’orchestre, nous livre dans cette œuvre quelques airs magnifiques — dont le célèbre duo final — qui seront, on s’en doute, remarquablement servis par les voix de Jonas Kauffman et de Maria Agresta, qui interprète Madeleine de Coligny, ainsi que celle de Claudio Sgura dans le rôle ambivalent de Carlo Gérard.

La partition est riche en contrastes et parvient à faire revivre une époque secouée par les idées contradictoires, le tumulte d’une époque qui bascule que traduisent les ruptures de genres et airs de cour, interrompus par le chant des miséreux, épisode du tribunal révolutionnaire, avec même au loin quelques échos de La Marseillaise. L’Opéra de Monte-Carlo accueille donc pour la première fois le ténor Jonas Kauffman dans une production scénique à Monaco reprenant un rôle avec lequel il a déjà triomphé sur plusieurs scènes internationales, dont celle de Vienne en décembre dernier, et avec la même partenaire Maria Agresta, soprano italienne très admirée par Cecilia Bartoli. Les chœurs et l’orchestre de Monte-Carlo seront dirigés par le chef Marco Armiliato, et la mise en scène est signée Pierfranco Maestrini. Andrea Chenier, l’un des chefs d’œuvre de ce courant que l’on nomme le vérisme, qui s’attache à des sujets populaires et réalistes, une œuvre émouvante écrite au tournant du 20e siècle sur un livret de Luigi Illica, est la deuxième production de cette toute nouvelle saison portée par la grande soprano Cecila Bartoli, qui a pris la direction de l’opéra Garnier : elle promet d’y partager trois siècles de ses goûts lyriques. De bien beaux moments en perspective ! 

19 fév 15h, 23 & 25 fév 20h, Opéra de Monte-Carlo, Monaco. Rens: opera.mc

photo: Jonas Kaufamnn © Bill Cooper